Appel à contributions - dossier spécial : Justices et transitions socioécologiques : dialogues entre disciplines et territoires, perspectives critiques et transversales
Responsables : Celine Berrier-Lucas (ISG) Dimbi Ramonjy (Excelia), Marie Fall (UQAC), Lovasoa Ramboarisata (UQAM).
La Revue Organisations et territoires disponible sur Érudit, publiera au printemps 2025 un dossier spécial consacré à la thématique : « Justices et transitions socioécologiques : dialogues entre disciplines et territoires, perspectives critiques et transversales »
Le présent appel vise à inviter les chercheuses et chercheurs et d’autres intervenantes et intervenants à soumettre un article ou un plaidoyer. Ceux-ci seront traités suivant le processus habituel d’évaluation de la revue.
Ce dossier spécial sera une occasion de dialogue entre différentes perspectives disciplinaires, qui s’articulent autour des approches critiques au sens large, défendant leur pertinence dans l’avancement des connaissances/savoirs, praxis et pédagogies sur les justices épistémiques et les transitions socioécologiques.
Il convie ainsi les propositions contribuant aux possibilités et au potentiel de la recherche critique et du plaidoyer pluriversal/pluriversel. Malgré des acquis et des convictions partagées autour des approches critiques comme possibles pour (re)pe(a)nser des alternatives dans un contexte de plantationocène et d’injustices socioécologiques et épistémique, nous constatons que la transdisciplinarité et la transversalité inhérentes à ces perspectives ne sont pas suffisamment mobilisées. De plus, les différents types de savoirs (scientifiques, citoyens, etc.) demeurent dissociés les uns des autres. Cela a pour conséquence le maintien des silos disciplinaires et théoriques (note 1) sans réel dialogue entre les différents courants adhérant au paradigme critique. Cela limite aussi la nécessaire conversation entre le milieu académique et les acteurs du terrain, porteurs d’initiatives en faveur des justices. Également, bien que la communauté scientifique francophone bénéficie d’une forte tradition critique (inspirée de Foucault, Derrida, De Beauvoir, Fanon, Glissant et tant d’autres), on constate que celle-ci a une certaine réserve face à l’intersectionnel, l’interculturel, l’interconnaissance et l’interaction alors que ces derniers imposent la transversalité indispensable à la déconstruction des connaissances et pratiques porteuses d’injustices et à l’imagination d’autres possibles (Curiel, Doshi, Ferdinand, Escobar, Quijano). Ainsi, les concepts de justice épistémique, de déhiérarchisation et de décolonialité devraient être, selon nous, au coeur des préoccupations de la communauté scientifique critique dans son ensemble.
Aujourd’hui, plusieurs perspectives et courants alternatifs se redéfinissent/se retrouvent dans une pluralité de propositions, de collectifs et de pratiques (Buen Vivir, communalité, féminismes communautaires, activismes de tout poil, mouvements autochtones ou afrodescendants, etc.). Dès lors, les académiques et les parties prenantes de projets territoriaux doivent (re)trouver le souci d’articuler des savoirs ancrés dans des réalités autour des luttes d’émancipation et de justice épistémique afin d’en élargir les imaginaires politiques et les possibilités de coalition.
Ce dossier répondra à la question de la redéfinition des relations de pouvoirs sur des enjeux partagés pour proposer une nouvelle façon de produire des savoirs et des connaissances sur le monde.
Comme nous définissons la critique de manière large, incluant à la fois la déconstruction/contestation (critique de la Modernité, critique de l’extractivisme, critique du développement positif, critique des théories du développement, etc.), et résistance/(re)construction d’alternatives, critique positive (innovations sociales, justices épistémiques, territorialisation, déhiérarchisation, visibilisation des subalternes, valorisation des savoirs citoyens, endogènes, ancestraux, autochtones, etc.), nous encourageons des contributions provenant de différentes disciplines et perspectives épistémiques.
Note 1 : Par exemple, d’un côté les perspectives décoloniales et de l’autre les épistémologies des Suds, les féminismes, ou encore l’économie politique, la géographie politique, les études autochtones, les migration studies, l’écologie décoloniale, les humanités environnementales, les gender studies, etc.
Les propositions peuvent porter sur les thèmes suivants sans s’y limiter :
1) Qualifier le potentiel de déconstruction mais aussi d’innovation et de ré-invention des approches critiques face à la crise socioécologique et aux injustices épistémiques
2) Décoloniser les savoirs théoriques et pratiques pour les transitions socio-écologiques et les justices épistémiques.
3) Décomplexer les chercheuses et chercheurs et les approches des périphéries (Sud global, autochtones, subalternes, classes sociales précaires et marginalisées, etc.) en déhiérarchisant les rapports de pouvoir sur les enjeux transversaux.
4) Valoriser, analyser et évaluer les pratiques organisationnelles ambitionnant une portée significative en faveur des justices épistémiques et des transitions socioécologiques.
5) Vulgariser des approches innovantes et porteuses de sens pour des communautés et groupes marginalisés.
Nous tenons toutefois à préciser qu’en cohérence avec le principe d’inclusion, les contributions qui ne sont pas associées à ces thèmes, mais qui s’inscrivent dans l’ontologie et l’épistémologie caractéristiques du paradigme critique, pourront être considérées.
Calendrier :
Soumission manuscrit V1 à l’équipe éditrice invitée à l’adresse approches.critiques.RSE@proton.me: avril 2024
Retour vers les autrices et auteurs : juin 2024
Soumission manuscrit V2 : septembre 2024
Retour vers les autrices et auteurs: au plus tard janvier 2025
Publication si manuscrit accepté : mars-avril 2025. À noter que ce délai est strictement fixé par l’équipe éditoriale. Pas de retard possible.
Le protocole de rédaction est disponible sur le site de la Revue Organisations et territoires. Vous y trouverez les consignes détaillées pour la rédaction d’un manuscrit. Nous tenons à insister sur l’obligation d’avoir un texte entre 10 et 18 pages et de respecter les normes bibliographiques et de citation APA, 7e édition.
Bibliographie indicative:
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